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Archive for the ‘Improvisation’ Category

Résonances de la Fontaine

May 27, 2012 1 comment

Le 19 mai dernier,

(An English version of this text can be found here)

(Enregistré par Andrew Simpson)

Le 19 mai dernier, les membres de La marche sonore comme processus d’interactions ont produit une captation sonore des Résonances de la Fontaine, qui ont eu lieu au Parc Lafontaine. Cette performance est basée sur une pièce sonore environnementale écrite par Malcom Goldstein en partenariat avec notre groupe de recherche. Sur la partition écrite par Goldstein, il est noté que « la performance musicale est le résultat d’une expérience d’écoute du Parc Lafontaine, ces sons environnementaux se voyant transformés à travers un jeu improvisé par les musiciens ainsi que les responsables de la captation (que Goldstein nomme les sound-recorder people) ». Il ajoute, « les sons de l’environnement ne doivent pas être imités; ce sont plutôt les résonances des ces matériaux sonores, les textures, les qualités tonales, les bruits, les articulation rythmiques et les dynamiques qui constitueront la base du jeu musical.

Après une courte réunion de production, les 6 interprètes (musiciens et responsables de la captation) se sont dirigés vers six lieux d’écoute dispersés à travers le parc, et choisis à même une liste de dix emplacement préparée par Goldstein (ces zones sont encerclées sur le plan situé ci-dessus). Je me suis attardé à deux stations situées près de l’eau, puis je me suis dirigé vers le terrain de balle-molle, pour finir avec les deux stations qui bordent la rue Sherbrooke jusque dans le coin sud-ouest du parc. Ma palette auditive s’est composée notamment de sons reliés au trafic automobile, ainsi que deux avions, quelques chants et vocalisations, le son de l’eau qui coule, les sons typiques de la pétanque, les bruits momentanés des discussions et des pas, quelques sons provenant du terrain de balle-molle, et les cris des enfants qui jouaient à proximité.

La performance a duré presque une heure, de 17h à 18h, durant une belle journée calme et ensoleillée. Goldstein a mis l’emphase sur l’improvisation, donnant à ce jeu une dimension ouverte basée sur l’écoute mutuelle et laissant beaucoup d’espace aux interprètes dans ses instructions. Il n’y a eu aucune répétition. Pour Goldstein, improviser signifie rompre avec de vieilles habitudes et intentions, rompre aussi avec les sons, les rythmes, les techniques et les gestes familiers. Ce travail de l’improvisation n’est pas sans défi pour les responsables de la captation; en effet, le simple fait de pointer un microphone relève déjà d’une intention, d’un geste motivé. Cette démarche nous a donc permis d’aborder l’enregistrement d’une manière moins focusée. Durant les semaines à venir, nous nous pencherons sur nos expériences respectives de cette performance en relation avec les thèmes de la marche sonore, de l’improvisation, ainsi que du rôle de la création, de l’écoute et des technologies sur la production de cet événement ainsi que son déroulement.

Prenez donc le temps d’écouter cette performance, et n’hésitez pas à nous faire parvenir vos commentaires et observations.

Résonances de la Fontaine

May 27, 2012 1 comment

(Recording by Andrew Simpson)

Une version française de ce texte se trouve ici

On May 19, members of the Soundwalking Interactions research group participated in the Résonances de la Fontaine performance, which took place in Parc Lafontaine, as sound recordists (or, as “sound-recorder people,” as Malcolm Goldstein puts it in the score).  As already noted on this site, Resonances de la Fontaine is an environmental sound piece by Malcolm Goldstein in collaboration with the Soundwalking Interactions research project.  In the score, which is comprised of two pages of notes and instructions written by Goldstein, he writes: “the music performance is the realization of a listening experience in Parc Lafontaine, Montreal—the sounds of that environment transformed through the improvised play of instrumental musicians and sound-recorder people.”  Adding:  “the sounds of the environment are not to be imitated.  Rather, ‘resonances’ of this source material/sounds are to be played with—textures, tonal and noise qualities, rhythmic articulations, dynamic shapes, etc.—performed and extended.”

After a brief production meeting (and lunch) on the day of the performance, the six performers spent time listening at six distinct sounding stations in the park.  We were given ten sections to choose from, which are marked by circles on the above map of Parc Lafontaine.  I spent time listening and recording at two stations near the water, in the pétanque area near the centre of the park, in the area around the baseball diamond, in addition to the two sections running along rue Sherbrooke, one of which is almost in the ‘south-east’ corner of the park.  My aural palette for the performance consisted of traffic sounds, two airplanes, singing, vocalizations, moving water, pétanque sounds, various groups of people talking, various footsteps, a few baseball sounds and the sounds from the children’s play area near the baseball diamond.

The performance lasted nearly one hour, from 5-6 PM, on a very sunny, beautiful, hot and mostly still day.  Goldstein emphasized ‘improvisation,’ remaining ‘open,’ listening to each other and allowing for ‘space’ while giving his instructions for the performance.  There was no rehearsal.  For Goldstein, improvisation means trying break from old habits, intention(s), familiar sounds, rhythms, techniques and gestures.  While working with a conception of improvisation that negates intention is complicated for sound recordists, in that, picking up a microphone is an act of intent, the recordists attempted to gather sounds in a less focused way.  In the coming weeks, the Soundwalking Interactions group will be thinking and writing about our experiences in Parc Lafontaine in relation to soundwalking, improvisation, creating meaning, performance, listening and the role/influence our technology played in the production process leading up to the performance, in the creation of our palettes and during the performance.

Please have a listen and let us know what what you think.

L’expérience auditive des espaces sonores – Une installation interactive

May 24, 2011 1 comment

Par Kathy Kennedy

An English version of this text can be found here.

La relation entre le son et l’espace, un thème récurrent que l’on retrouve dans les diverses formes  d’art sonore actuelles, fait l’objet d’une nouvelle investigation à travers une installation sonore créée par Andra McCartney. J’ai récemment pris part à cette création en cours lors d’une session tenue au département de communications de l’université Concordia, en présence de Dr McCartney et ses étudiants à la maîtrise et au doctorat. Cette installation interactive utilise des enregistrements sonores ambiants, activés et manipulés par le mouvement des participants dans un espace physique précis. Les enregistrements provenaient de sources et lieux différents, que ce soit des bruits de trafic, des sons d’ascenseur, des paysages sonores urbains et campagnards ponctués de chants d’oiseaux, de portes qui claquent, de voitures ou de musique. Tous les enregistrements ont cependant été effectués autour du lieu de la performance, soit le campus Loyola ainsi que le quartier qui l’abrite. D’un côté de la pièce, on retrouve une immense surface de projection qui couvre un mur entier, et sur laquelle est projetée une grille constituée de 16 carrés identiques ainsi que les images corporelles des participants se déplaçant dans l’espace de performance. Des changements de couleur y indiquent les variations de vitesse de déplacement. Cette grille est en fait une reproduction d’un espace de même dimension situé au sol, et sur lequel les participants peuvent bouger librement tout en activant les extraits sonores associés à chaque cellule. Ces sons sont alors projetés à partir de quatre hauts-parleurs situés au quatre coin de l’espace d’interactivité.

Dr McCartney et trois de ses étudiants ont chacun fourni quatre extraits sonores de 30 à 60 secondes, correspond aux 16 carrés disponibles. Chacun des participants se voyait attitré un quart de l’espace, ce qui correspond à quatre carrés (et quatre extraits). Les mouvements des participants sont captés par une caméra vidéo situé au-dessus de l’espace de performance. Le signal vidéo est alors décodé par une session Max/MSP/Jitter qui active les sons correspondants aux carrés tout en reproduisant les mouvements visuels à l’écran. En d’autres mots, l’espace d’interaction est transformé en scène de performance, reproduite visuellement sur l’écran de projection. La vitesse et l’intensité des mouvements sont traduites par des changements d’intensité sonore et de couleur, les teintes foncées représentant les mouvement plus lents alors que les teinte claires exprimaient une intensification du mouvement.

Les quatre participants se déplaçaient librement  à travers l’espace tout en explorant les possibilités sonores et visuelles offertes par les combinaisons de mouvements et d’intensité. Le stimulus visuel créé par la projection créait des traces organiques qui renforçait la boucle de rétroaction entre sons et positions physiques. Un geste brusque, un saut ou une oscillation des bras résultaient en une attaque plus rapide ou bien une hausse soudaine du volume sonore, à l’image d’un gigantesque instrument joué par quatre musiciens. Ce modèle de collaboration musicale permet une grande liberté créative, tout en nécessitant une expérimentation et un ajustement continus face au feedback visuel et sonore.

Il est important, comme pour toute oeuvre interactive, de qualifier la nature et le niveau d’interaction créés par l’installation.  L’idée de créer différentes atmosphères sonores en se déplaçant à travers un espace physique est très inspirante; elle correspond à notre expérience concrète, alors que nos déplacements modifient la nature du paysage entendu. Toutefois, cette oeuvre nous transporte dans une univers de nouvelles possibilités, les sons y provenant de toutes les directions (grâce aux quatre hauts-parleurs), et ce sans que les participants en aient le contrôle. Tout au long de la séance, la session Max était ajustée et modifiée par son créateur, Don Sinclair, dans le but de rendre aléatoire (et donc toujours nouvelle) la configuration sonore de l’espace d’interaction. D’autres modalités telles que le déplacement des sources sonores dans chaque quart, on été explorées.

Le facteur le plus déterminant du niveau d’interaction m’apparaît cependant être le choix des divers sources sonores employées. Les enregistrements ambiantaux manquaient parfois de traits distinctifs durant leurs premiers instants; cela nécessitait un certain délai avant de pouvoir reconnaître l’extrait sonore, ce qui se traduisait en des délais additionnels pour en modifier l’intensité. La vitesse de réaction est vite devenue essentielle au maintien d’une certaine interactivité entre les participants. Aussi, on pouvait observer un lien entre la durée des extraits et les types de mouvements et d’interactions qu’ils engendraient. Certains segments comprenant des éléments facilement identifiables ou des traits distinctifs étaient utilisés de façon plus récurrente par les participants.

Un des aspects les plus positifs de cette forme d’interactivité était la fluidité et la liberté de mouvement des participants. À travers leur exploration visuelle et sonore, les participants se transformaient en danseurs dignes d’une performance chorégraphiée. Il m’a aussi semblé que les éléments visuels de l’oeuvre jouaient un rôle important dans l’activité des participants. Alors que ceux-ci réagissaient aux différentes traces visuelles à l’écran, je me plaisais aussi, comme spectatrice. à observer ce processus dynamique, l’ombre de chaque corps apparaissant à l’écran comme une preuve poétique de l’inéluctable présence de l’humain dans tout enregistrement sur le terrain. À travers cette oeuvre, chaque participant est appelé(e) à déclencher des sons de par leur position géographique ainsi que l’intensité de leurs mouvements à travers l’espace. Si cette corrélation n’est pas tout à fait nouvelle dans l’univers des installations interactives, l’utilisation d’enregistrements provenant de lieux à proximité nous projette rapidement dans un monde “situé,” créant ainsi un monde de cause à effet. On se déplace dans un monde clairement défini et délimité (le sol, le quadrillage) dans le but de modifier un monde sonore beaucoup plus flou et amorphe.

Un des aspects les plus plaisants de cette oeuvre était d’y observer l’élévation de la conscience sonore et physique des participants. Si la notion de navigation à travers l’espace physique dans le but de créer et de modifier les sonorités qu’on y retrouve peut sembler de prime abord fantaisiste, elle constitue néanmoins une importante démarche d’exploration qui permet d’aborder, à travers notre expérience et conscience auditive, nos manières d’occuper l’espace physique.

La marche sonore et l’improvisation

May 10, 2010 1 comment

Article publié sur le site web Improvisation, Communauté et Pratiques Sociales

Certains partisans de la marche sonore ont décrit la capacité d’improvisation auditive requise pour réagir aux conditions météorologiques, saisonnières ainsi qu’à tous les autres changements de l’environnement sonore et du parcours des marcheurs selon les indices de leur réaction auditive. Malgré tout, les marches sonores sont généralement conçues à l’avance, les routes et événements étant prévues telles une partition qui dirige et limite l’expérience des participants. De la même façon, les marches sonores enregistrées, les marches avec casques d’écoute et les guides sonores offrent des expériences pré-délimitées aux auditeurs et auditrices. Les chercheurs en environnement proposent communément aux participants d’imaginer leur marche comme une composition sonore. Qu’arrive-t-il lorsque celle-ci est plutôt imaginée sur le mode de l’improvisation? Je propose dans cet article quelques pistes qui servent à démontrer les nombreux avantages qui accompagnent un tel changement d’orientation, spécifiquement au niveau de l’écoute, de la conception des marches sonores, de leur enregistrement, et du montage subséquent.

La marche sonore permet de créer un parcours  centré sur l’écoute. Elle forme ainsi un lien entre l’expérience quotidienne de la marche, et celle plus créative de l’écoute. Cette écoute varie selon le contexte de la marche; enregistrée ou non, seul ou en groupe. Les marches en groupe sont traditionnellement menées par un ou une guide qui suggérera certains modes d’écoutes à explorer durant la marche. L’écoute peut ainsi être musicale, corporelle, historique, politique ou même multisensorielle. L’utilisation d’appareils d’enregistrement portable influencera aussi le déroulement de la marche, l’environnement sonore étant alors médiatisé et amplifié par le biais du microphone, et la marche influencée par la présence visible de celui ou celle qui fait la captation.

Dans mes installations d’environnement sonore, je tente de créer des situations dans lesquelles les participants peuvent interagir directement avec les sons. Avec Soundwalk to Home [marche sonore vers chez-soi], les auditeurs pouvaient choisir entre une série d’enregistrements décrits dans un livret dans lequel ils pouvaient aussi leurs commentaires ou souvenirs. Dans le cas de Journées Sonores : Canal de Lachine, les participants pouvaient choisir entre des extraits sonores historiques ou contemporains diffusés à même le casque d’un séchoir à cheveux des années 50. Dans un autre espace de la galerie, il était possible grâce à un mixeur de huit pistes, de reconstruire l’environnement sonore du canal en utilisant une variété de sons tels le craquement de la glace, des bruits de construction, des chants d’hirondelles, le bruit du trafic, etc. Ma prochaine installation permettra aux visiteurs d’interagir avec des enregistrements d’environnements sonores en se déplaçant dans l’espace de la galerie, et en utilisant un microphone.

Mon projet Soundwalking Interactions [la marche sonore comme processus d’interaction] a récemment reçu l’appui financier du gouvernement du Québec à travers son programme de recherche-création. Ce projet me permettra d’étudier la marche sonore, l’improvisation ainsi que la relation communicationnelle artiste-auditoire. La prochaine étape de ce projet consiste à développer des méthodes pour improviser directement avec des extraits provenant de marches sonores, en utilisant divers modules de mixage et d’effet de manière à mettre l’emphase sur certaines caractéristiques sonores des extraits, tout en permettant aux participants de contrôler ceux-ci à l’aide de mouvements corporels.